Communication de la Commission – Lignes directrices relatives à l’application des règles spécifiques énoncées aux articles 169, 170 et 171 du règlement OCM concernant les secteurs de l’huile d’olive, de la viande bovine et des grandes cultures, JOUE, C 431, 22/12/2015, p.1.)

Le règlement OCM1 du 17 décembre 2013 prévoit des dérogations aux règles de concurrence et, notamment, à l’interdiction des ententes sur les prix. Outre une dérogation générale applicable à tous les secteurs agricoles, les articles 169, 170 et 171 de ce règlement prévoit des règles spécifiques relatives aux négociations contractuelles, dans les secteurs de l’huile d’olive, de la viande bovine et des grandes cultures, par les organisations de producteurs (ci-après « OP ») reconnues, afin de renforcer leur pouvoir de négociation des producteurs vis-à-vis des opérateurs en aval et de permet à ces organisations de négocier les clauses des contrats de livraison, y compris les prix.

En effet, ainsi que le rappelle les lignes directrices de la Commission, une association de producteurs individuels est à la fois une association d’entreprises et une entreprise au sens du droit de la concurrence. Le droit de la concurrence s’applique donc à la fois aux accords entre producteurs individuels (par exemple, les statuts de l’organisation de producteur) et aux décisions et contrats adoptés par l’OP, les accords de coopération pouvant, dans certains cas, être favorables à la concurrence.

La Commission examine ensuite les conditions des deux dérogations prévues par le règlement OCM.

1. La dérogation générale prévue à l’article 209 du règlement OCM pour tous les secteurs

L’article 209 du règlement OCM prévoit une dérogation générale visant tous les secteurs agricoles : sont exclus du champ d’application de l’article 101, paragraphe 1, les accords et pratiques, qui ne comportent pas une obligation de prix et n’excluent pas la concurrence et remplissant les conditions suivantes :

  1. Les accords et pratiques nécessaires à la réalisation de tous les objectifs de la PAC énoncés à l’article 39 du TFUE
  2. Certains accords ou pratiques, d’associations de producteurs, d’associations d’associations, d’OP, d’AOP portant sur la production ou la vente de produits agricoles ou l’utilisation d’installation conjointes de stockage, de traitement ou de transformation des produits agricoles, à moins que les objectifs de la PAC soit mis en péril.

La Commission vient préciser qu’aucune décision préalable de la Commission ou d’une autorité nationale n’est nécessaire pour bénéficier de cette dérogation mais elle précise que, le cas échéant, les associations de producteurs en cause devront être en mesure de prouver que les conditions de la dérogation générale sont bien réunies en l’espèce.

2. Les dérogations spécifiques prévues par les articles 169,170 et 171 du règlement OCM pour les secteurs de l’huile d’olive, de la viande bovine et des grandes cultures

Ces trois articles créent, sous certaines conditions, des dérogations à l’application des articles 101 et 102 du TFUE dans certains secteurs (huile d’olive, viande bovine et grandes cultures) pour tout accord, décision ou pratique adoptés par l’OP ou une association d’OP lorsqu’elle négocie des contrats d’approvisionnements au nom de ses membres.

Ces dérogations ont pour objectif de renforcer le pouvoir de négociation des producteurs dans ces secteurs afin de leur assurer une rémunération équitable et d’assurer un développement viable du secteur, en renforçant efficacement l’offre et la mise sur le marché des produits et en leur permettant de négocier les contrats d’approvisionnement au nom de leurs membres.

Ces dérogations sont soumises à certaines conditions, relatives, d’une part, aux OP et, d’autre part, aux négociations :

  • Les OP doivent être reconnues, viser les objectifs de la PAC et exercer de façon significative l’une des activités de soutien aux producteurs listées (distribution conjointe, promotion conjointe, organisation du contrôle de qualité, utilisation conjointe des équipements…) ;
  • Les négociations peuvent être menées qu’il y ait eu un transfert de propriété ou non et que le prix soit ou non identique pour la production totale. Elle ne peuvent concerner qu’un volume de produit inférieur à certains seuils (15% du marché national pour la viande bovine, 15% de la production nationale pour les grandes cultures et 20% du marché en cause pour l’huile d’olive). Les négociations ne doivent pas porter sur des volumes de producteurs membres d’une autre OP ou affiliés à une coopérative. Enfin, les volumes faisant l’objet de ces négociations doivent être notifiés aux autorités compétentes de l’Etat membre.

La Commission fournit des grilles d’analyse, listant les questions à se poser, destinées à faciliter l’autoévaluation par les producteurs agricoles et les OP de la conformité de leurs accords ou pratiques et listant les questions à se poser.

La Commission détaille également, dans ses lignes directrices, chacune des conditions de la dérogation, à savoir la reconnaissance de l’organisation de producteurs ou de l’AOP, les objectifs de l’OP, un test de gains d’efficience substantiels (en fournissant une méthode simplifiée permettant de présumer ces gains et une méthode alternative), les relations entre l’OP et ses membres, les conditions d’appréciation des seuils édictés par le règlement OCM. Elle précise également que le respect de l’obligation de notification n’implique pas que l’autorité nationale a validé la pratique. L’examen de chaque condition est accompagné de plusieurs exemples pratiques pour chaque secteur.

La Commission détaille enfin les conditions de mise en œuvre de la clause de sauvegarde par l’autorité de la concurrence compétente lorsqu’elle estime qu’il existe un risque d’exclusion de la concurrence, un risque de dépassement des seuils ou de menace pour les objectifs de la PAC.

Compte-tenu de la complexité du cadre règlementaire applicable au secteur agricole, on ne peut que saluer cet effort de pédagogie de la Commission européenne, qui devrait permettre aux OP de mieux utiliser ces dérogations. Il n’en demeure pas moins que certains critères demeurent complexes à apprécier.


1Règlement (UE) n°1308/2013 du Parlement européen et du Conseil du 17 décembre 2013 portant organisation commune des marchés des produits agricoles et abrogeant les règlements (CEE) n°922/72 (CEE),j n°234/79 (CE), (CE) n°1037/2001 et (CE) n°1234/2007 du Conseil, JO L347 du 20 décembre 2013, p.671.